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Haïti : La distribution de l’aide aux sinistrés de Gonaïves - un vrai casse-tête

Source: United Nations Stabilization Mission in Haiti (MINUSTAH)
Date: 09 Sep 2008

Gonaïves est toujours dans la zone rouge. Si les pluies ont cessé et le soleil est réapparu, il reste la question essentielle de l’acheminement de l’aide humanitaire aux nombreuses victimes des ouragans Hanna et Ike qui ont ravagé la ville durant la semaine écoulée.

Le bilan de Hanna et Ike ne cesse de s’alourdir. Au fur et à mesure que le niveau de l’eau baisse, l’on retrouve de nouveaux corps. Et déjà se posent de brulantes questions: comment acheminer au plus vite l’aide aux victimes? Comment éviter les épidémies ? Comment rassurer des populations qui ont tout perdu ? Bref, la gestion de l’assistance humanitaire destinée aux victimes des terribles ouragans qui ont dévasté la Cité de l’indépendance représente aujourd’hui un véritable défi.

«Cette situation est particulière et la tâche est difficile. Plusieurs centres d’accueil se trouvent dans la partie sud de la ville qui est inaccessible. Ce qui rend impossible toute action de distribution », souligne, en effet, la Coordonnatrice départementale de la Direction de la Protection Civile (DPC), Yolène Surena.

De poursuivre, Mme Surena, qui pilote les opérations d’assistance aux populations, explique : «s’il y a 300.000 habitants aux Gonaïves, nous avons 250 000 sinistrés directs. Les autres membres de la population sont, pour leur part, des sinistrés indirects ».

Par ailleurs, Yolène Surena précise que, pour l’instant, son action s’articule autour de deux axes essentiels : « mettre les populations à pied sec », c’est-à-dire les évacuer des zones susceptibles d’être inondées vers des zones plus sûres, et «acheminer l’assistance humanitaire aux victimes ».

En ce qui concerne l’évacuation, les données indiquent que près de 30.000 personnes ont migré du sud vers le nord de la ville, en camions mis à disposition par la DPC ou à pied. Un effectif somme toute faible pour une zone qui abrite environ 200.000 âmes. Deux grands centres d’accueil sont opérationnels dans la partie nord : l’église catholique de Praville et le centre de CARE à Gattereau.

La Coordonnatrice départementale de la Direction de la Protection Civile (DPC) assure que dès que le niveau des eaux sera plus bas, des opérations de distribution de biscuits protéinés, de l’eau et de kits hygiéniques vont démarrer dans ces zones. Pour le moment, l’aide est stockée dans un port privé de la ville et dans les locaux de la MINUSTAH.

Toutefois, «10.000 personnes ont déjà reçu des plats chauds, 18.000 autres, des biscuits protéinés, de l’eau et des kits d’hygiène ». En outre, quatre centres de soins d’urgence sont opérationnels. Les traitements portent sur les blessés, les infections vaginales, les maladies diarrhéiques et les infections de la peau.

« Pour le moment, les corps de 101 personnes ont été retrouvés. Trois sont décédés dans des abris provisoires. Un Bureau de doléances est en train d’être mis sur pied par la Mairie, pour travailler sur la question des disparus », a souligné Mme Surena.

Le déblaiement des différentes voies est également une priorité. Cela doit permettre un meilleur accès aux banques et aux pharmacies les plus proches, notamment dans la ville de Saint Marc (à 50 km environ).

De 2.500 au départ, le nombre de bénéficiaires de l’aide humanitaire est passé à environ 10.000 par jour. Cette augmentation des bénéficiaires s’accompagne cependant de l’accroissement des difficultés relatives à la distribution de l’aide.

« Il y a trop de violence dans les centres de distribution. Je préfère mourir de faim au lieu d’y être humilié », explique un juge du tribunal de Première Instance de la ville, lui qui a également tout perdu. Il a pu, comme plusieurs Gonaïviens, faire partir femme et enfants pour des lieux sûrs, notamment à Port-au-Prince, la capitale du pays. « Moi, je suis resté parce que j’ai environ 40 personnes chez moi. Je ne peux pas les abandonner », explique-t-il.

Le Pasteur Jérôme, qui officie dans une église très fréquentée de la ville, pense qu’il est important d’adapter la stratégie de distribution à la réalité locale. « Même dans la misère, les Gonaïviens revendiquent leur dignité. Les centres de distribution, ce n’est pas dans notre culture. Nous préférons nous mettre à l’étroit à 50 ou 60 chez un parent, au lieu d’exposer notre détresse dans les centres de distribution », soutient-il.

Cette sensibilité locale est de plus en plus prise en compte. Les foyers qui accueillent environ 40 personnes sont maintenant considérés comme des centres d’hébergement, et de l’aide alimentaire y est distribuée.

Par ailleurs, à la faveur notamment de la légère baisse du niveau de l’eau qui, en certains endroits, atteint encore environ deux mètres, des convois de l’aide humanitaire ont pu atteindre, le 8 septembre, les quartiers chauds de Raboteau, de Jubilé, de Ka Soley. Il s’agit toutefois d’une action encore timide, vue l’immensité des besoins.

En attendant la baisse considérable du niveau des eaux dans le sud de la ville, une stratégie massive de distribution est toujours recherchée par les différents acteurs de l’action humanitaire et les autorités locales. Néanmoins, il s’avère nécessaire que cette stratégie soit rapidement effective car «l’impatience commence à se faire sentir ».

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