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Haiti : Fay, Gustav, Hanna, Ike et la nonchalance des Haïtiens de Montréal

HPN
Posté le 9 septembre 2008


Entre mutisme et «désolation», les compatriotes de la diaspora canadienne constatent la gravité des dégâts provoqués en Haïti par Fay, Gustav, Hanna et Ike. Mais la générosité n’est pas au rendez-vous, compte tenu de la mauvaise expérience de 2004.

Par Goudou Jean Numa

La grande générosité dont avaient fait preuve les Québécois et les Haïtiens de Montréal lors du passage de la tempête Jeanne, en septembre 2004 en Haïti et qui avait ravagé Gonaïves, fait place aujourd’hui au mutisme des uns et à la «désolation» des autres devant la gravité de la situation à la suite de Fay, Gustav, Hanna et Ike, quatre ouragans qui viennent de frapper de plein fouet le pays. Il est encore tôt de parler d’établir un bilan définitif des morts et de dégâts.

Il y a quatre ans, à l’initiative de l’Organisme d’entraide canado-haïtien (ODECH) environ 530 mille dollars avaient été amassés lors d’un radiothon auquel CPAM la radio haïtienne de Montréal et plusieurs médias québécois avaient apporté leur appui.

Aujourd’hui, les acteurs-clés de cette activité excluent catégoriquement toute implication dans une campagne de mobilisation de fonds tant les relents de la controverse autour de la gestion de ce demi-million de dollars sont vifs.

«Non. Je n’aurais jamais participé à une activité du même genre aujourd’hui», tranche Mathieu Demerson, ancien vice-président d’ODECH et qui avait pris la sortie de l’organisme avec fracas en raison de désaccords majeurs avec beaucoup de ses collaborateurs.

«Je disais que l’argent devait aller aux enfants qui avaient perdu leurs parents afin de leur assurer un avenir. C’est pour cela qu’ils m’ont mis à la porte», dénonce M. Demerson joint au téléphone.

Même si ce n’est pas pour les mêmes raisons, la présidente d’ODECH, Asma Hertelou, s’en lave les mains également. «Nous avons décidé, pour le moment dit-elle, de ne pas organiser d’activités, car nous n’avons pas de garanties de la part du gouvernement haïtien que nos actions seront concluantes», déclare Mme Hertelou.

Jusqu’à présent, deux containers de 3000 réchauds à combustion lente et de trois fours à fabrication de charbon destinés aux habitants des Gonaïves, d’une valeur de 110 mille dollars, restent coincés aux douanes de Port-au-Prince. Il faudrait près de 20 mille dollars pour les faire sortir.

Il demeure que ces Haïtiens de Montréal qui se chamaillent depuis quatre ans autour de Jeanne soient anéantis complètement et soient en état de prostration devant la situation actuelle. «Je suis complètement dégoûté, abasourdi, lâche Mathieu Demerson, c’est assez difficile maintenant car le Québécois qui a en mémoire toute cette controverse doit se dire je vais voir si les Haïtiens vont demander encore de l’argent».

Ses philippiques ne sont seulement dirigées contre ODECH mais aussi à l’endroit du gouvernement haïtien. «Quand on regarde ce qui se passe aux Gonaïves présentement, le blâme ne revient pas ODECH seulement. C’est tout le travail du gouvernement qu’il faut remettre en question», croit M.Demerson, originaire lui de Petit-Goave.

L’actuelle présidente de l’organisme qui rejette ces critiques dit accueillir «avec désolation», les nouvelles sur les tempêtes qui ont balayé le pays. Asma Hertelou défend ses choix de projet et cartonne même les Organisations non gouvernementales (ONG), qui, selon certaines évaluations auraient dépensé plus de trois millions de dollars dans le cadre de Jeanne.

«J’accueille les dernières nouvelles avec désolation car si au moins la moitié de ces fonds ont été utilisés pour des projets durables tels l’amélioration du bassin versant, on n’en serait pas là aujourd’hui», estime Mme Hertelou.

Son organisme (ODECH) avait dépensé près de 100 mille dollars dans un projet de sensibilisation à l’environnement et davantage pour l’amélioration d’un des bassins versant aux Gonaïves. Ce dernier projet piloté par l’Université Laval (Québec) traîne encore la savate mais devrait démarrer l’année prochaine affirme-t-elle.

À défaut d’ODECH, les Haïtiens de Montréal se tournent vers ces ONG justement afin de contribuer aux efforts d’aide d’urgence. La Croix-Rouge internationale vient de lancer un appel de fonds de l’ordre de 3.4 millions de dollars et la section canadienne accueille déjà de l’argent du gouvernement québécois.

Oxfam-Québec, un autre organisme présent en Haïti vient de lancer le même appel et reçoit beaucoup de soutien de particuliers haïtiens selon la porte-parole Julie McHugh jointe au téléphone à Montréal. «Je ne peux pas vous dire en détails combien ils sont mais nous recevons des chèques des Haïtiens », indique-t-elle.

La Chorale de la nouvelle génération qui prévoit réaliser un concert en novembre donnera un dollar sur chaque billet à l’ONG afin d’aider les sinistrés.

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